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Plein de Caporal
13 septembre 2015

LE JEU DU SIECLE

 

Lu pour vous...

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Le jeu du siècle, de Kenzaburo Oé

C'est l'histoire d'un retour à la terre natale, avec ce frère de retour des espérances juvéniles d'une génération, et qui sera tout au long de cette lente, puissante initiation à l'humiliation, le double superbe, moqueur, le ferment même de l'humiliation.

On attend, nous, lecteurs à grands nez, que le narrateur découvre quelque secret dans son coeur éprouvé, apprenne de ses erreurs et nous indique, à défaut de la suivre lui-même, la voie de la vertue accomplie. Nous espérons un moraliste et découvrons un peu déconcertés un homme à complexes qui semble se complaire dans l'inaction, l'introspection et l'autodénigrement. Mitsu nous déçoit dans son rôle de mari, de frère, d'héritier. Il nous irrite par la faiblesse chronique de sa volonté, qui retombe immanquablement dans la contemplation des mécanismes qui mènent une société au désastre. Mitsu est pourtant le plus abouti des héros d'Oé, père désemparé d'un enfant handicapé, cet homme sur qui on ne peut pas compter et qui ne donne jamais tort aux autres. L'éternel mari trompé.

Si le héros est la projection de l'auteur dans une situation donnée, alors Mitsu nous déroute, lecteurs habitués depuis Odysseus à ce que la vérité soit du côté de celui qui parle. Les premières phrases sont décisives, elles rappellent les atermoiements d'un Proust ou de son narrateur dans ce lit d'où précisément il nous écrit. Ce ne sera pas le goût d'un biscuit amolli dans du thé qui le guidera dans l'oeuvre qui apparaît comme une rêve éveillé, mais l'homme mort, le souvenir de l'homme mort.

A la fin de cet été, mon ami s'est pendu, la tête et le visage peints en rouge, un concombre dans l'anus.

Retour d'un passé familial insupportable, retour improbable dans ce village dans la forêt où plongent les racines de toute l'oeuvre d'Oé dont ce roman, format occidental assumé, est comme la projection d'un esprit malade dans son propre imaginaire en perpétuel devenir, quand le corps, incapable de somatiser, n'a pas quitté ce trou où il s'est lové.

 

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Plein de Caporal
  • Dire ce que l'on a sur le cœur, ne pas voler, le dire en chantant, en écrivant, Odysseus déjà les lui confiait, ses tourments, pour rigoler, menteur métissé, enchanteur, en chantier, et puis lire encore, l'ouvrir aux autres, le fermer enfin.
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